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lumières du matin, lumières du couchant, lumières et couleurs d'automne, ah lumières...

Sunday, November 30, 2014

Ce matin, dimanche brumeux sur l'île de France. L'hiver arrive... Petit matin blême, ciel de coton, air glacial et humide,... l'hiver s'en vient, qu'il fait bon rester au chaud et essayer les nouveaux crayons de couleurs achetés la veille sur les quais de Seine en écoutant Sunny Road d'Emilíana Torrini et le reste de son album de 2004, Fisherman's woman.
Alice, d'après photo jardin des tuileries - Paris - crayons de couleur - 2014-11-30
Hier, c'était différent. Hier j'avais rendez vous à Odéon avec un de mes modèles, Juliette. Je suis arrivé tôt à Saint Germain. L'air était juste frais ce qu'il faut pour être qualifié de "vivifiant" et la lumière magnifique. Les reflets dorés sur les vieilles pierres foulées par Voltaire ou Robespierre piquaient les yeux comme le froid descendant jour après jour sur la ville commençait à piquer la peau.
Vêtu de bleu de la tête au pied, j'avançais à pas vifs vers ce magasin de beaux arts mythique où les impressionnistes achetèrent en leur temps les pastels qui firent leur renommée : Sennelier.

Lumières d'automne, lumières du matin. Bleu était le ciel, d'un bleu de cobalt très pâle, bleue était la Seine qui lui répondait, d'un bleu plus sombre, plus profond, cerné par les ors des vielles pierres. J'aurais presque vu la lumière et l'air froid se matérialiser sous forme de paillettes d'or voletant autour de moi ce matin là.

Sennelier et ses espaces étroits, ses moquettes rouges et ses boiseries patinées, ses odeurs de toiles et de crayons de bois. Sa clientèle hétéroclite aux couleurs bariolées, aux vêtements bigarrés, mais ayant en commun ce même air allumé, un pied dans les deux mondes...

Le vendeur qui me renseigna sur les crayons, cheveux courts et barbe dense d'un brun sombre aux reflets roux ressemblait à un portrait de Manet. Il m'orienta vers la gamme Caran d'Ache Luminance 6901 tirant son nom de la norme internationale de la résistance de la couleur à la lumière... Couleurs et lumières...

Lumières d'automne, lumière du couchant. Cet après midi là, je finalise le dessin du visage d'Alice dont j'essaie depuis des semaines de retrouver les reflets de cette lumière d'un soleil de fin de journée d'automne. Je suis à La Palette, rue de Seine, entouré de touristes discrets et de nouveaux riches braillards venus se montrer dans ce café. A ma table, un oasis de calme, le crayon glisse doucement sur le papier, les traits d'une couleur croisent ceux d'une autre, les reflets apparaissent, la gomme enlève du pigment faisant réapparaître la blancheur du papier, la lumière se fait,... que la lumière soit...

Sur la papier, renaît un peu de Lautrec, un peu de Degas, et plus ancien encore, un air de Boucher, de Fragonard et de Watteau. Messieurs nos maîtres, vous vivez toujours, nous pensons à vous tous les jours quand nous nous isolons dans le silence de notre art. L'avenir appartient à celui qui a la mémoire la plus longue disait Nietzsche...Couleurs et lumières... je garde de cette journée un kaléidoscope qui tourne en moi et rend inoffensif le ciel de coton froid et humide d'aujourd'hui.